Le retour des vieux problèmes géographiques de la France !
Les récentes décisions du nouveau pouvoir, un certain nombre de polémiques ou de déclarations récentes montrent le retour des vieilles questions d’aménagement du territoire dans notre pays.
La première concerne les rapports Paris et Province ! En 1947 la publication de l’ouvrage de J.F. Gravier « Paris et le désert Français » avait fait comprendre que pendant toute la révolution industrielle, notre capitale avait nourri son développement énorme de la substance de la province qu’elle soit démographique, économique, culturelle, politique ou autre. Depuis les rois de France jusqu’à la troisième république , en passant par la révolution française et le second Empire, l’état Français centralisateur n’avait eu de cesse de tout concentrer à Paris, point de départ des Nationales sous Louis XIV ou des lignes de chemin de fer au XIXème, pour attirer la population au point que sur 200 km autour du monstre de l’agglomération parisienne, la densité de population est très faible, sans ville importante.
Depuis et surtout sous la cinquième république, le pouvoir politique a tenté d’équilibrer avec la politique dite de décentralisation, déconcentration, les mots utilisés ont été nombreux. La correction a été souvent réduite, par exemple les lignes de TGV partent toutes de Paris et les TGV dits « Province-Province » desservent tous au moins 1 gare d’Ile de France parfois au prix d’un grand détour . Toutefois on a tenté d’atténuer les effets de cette centralisation parisienne avec des métropoles d’équilibre et des pouvoirs donnés aux départements et régions !
Or depuis cet été que constate- t-on ?
La diminution drastique des dotations aux collectivités locales coupe toute ressource financière à la province
Tous les grand travaux de province sont stoppés, autoroutes, TGV etc c’est fini, la raison écologique n’est là que pour masquer la mainmise parisienne, alors que des projets pharaoniques en particulier de métro démarrent en agglomération parisienne
La politique du logement mise en place ne concerne que les zones tendues, soit l’agglomération de Paris. Il faut construire pour baisser les prix mais on ignore que sur 90% du territoire il y a un excès de logement avec un effondrement du marché !
Tout est clair, la pouvoir actuel est exclusivement parisien pour aspirer les dernières substances de la province, les territoires, comme on dit maintenant, sont là pour mourir !
Les polémiques ont aussi concerné deux zones géographiques, Bordeaux et Saint Etienne, ce n’est pas un hasard si ces noms sont ressortis car il s’agit de deux « poils à gratter » très originaux de la géographie française depuis l’ancien régime
Bordeaux, est la plus grande réussite portuaire sous la monarchie dans un pays qui a toujours été en retrait au niveau maritime. Ceci a commencé avec le commerce des vins à l’époque des anglais pour connaitre son apogée au XVIIIème. A cette époque, Bordeaux est le second port mondial et le patrimoine architectural que l’on admire aujourd’hui date de cette période faste. Cette richesse a été cassée par Paris lors de la révolution Française, non seulement les « girondins » ont été guillotinés, mais en 1799, le trafic portuaire de Bordeaux était dix fois plus faible que 10 ans plus tôt. Depuis la ville et le port s’étaient endormis, la révolution industrielle du XIX ème les avait peu concernés. Alors que Bordeaux se réveille, on peut comprendre que l’arrivée de parisiens gratte le poil les bordelais !
Saint Etienne est aussi un autre poil à gratter : le premier, le principal et surtout le plus complet et le plus diversifié centre industriel français du pays jusqu’en 1860. Après l’ère de l’armurerie et la passementerie, celle du charbon bien avant les autres principaux gisements du pays et la métallurgie prend la suite, puis celle des commerces à succursales, du chocolat etc. Ensuite la ville a dû faire face à l’emprise parisienne et à l’hostilité Lyonnaise. Elle a longtemps résisté mais depuis 1974, la crise a fait de très gros ravages. Il y a cependant des restes, le siège social de l’un des plus grands groupes français de distribution, un réseau de PME très dense etc... L’agglomération est victime d’un véritable blocus avec sa liaison vers la vallée du Rhône avec une autoroute saturée dont on repousse régulièrement le doublement et une voie ferrée délaissée par la SNCF en dépit d’un nombre de voyageurs qui en fait la première ligne française, hors agglomération parisienne. Alors toute déclaration intempestive peut heurter le poil à gratter de victimes des pouvoirs parisiens et régionaux. L’an dernier un article du Monde avait provoqué une violente réaction dans la ville jusqu’à ce que la journaliste demande grâce. Anecdote humoristique, Vidal de la Blache, le grand géographe, a placé Saint-Etienne à l’emplacement du Puy dans son « Tableau de la géographie de la France » (carte p 379), Paris n’a jamais su où était Saint Etienne, par contre de Lyon on est obligé de traverser la ville pour aller au Puy !
Il n’est jamais bon de chatouiller les susceptibilités géographiques surtout quand ces dernières ont des racines solides dans l’histoire
Gérard Staron