L'été de la Saint Martin: une réalité climatique
Chronique climatologie N°603 texte d’origine
Enregistrement le 16 novembre, passage antenne le 18 novembre 2006 Radio Espérance
Cette année (2006) nous connaissons un véritable été de la Saint Martin qui risque de figurer parmi les plus longs de ces 20 dernières années.
L’ancien officier romain d’origine hongroise devenu évêque de Tours a laissé son nom à une période de beau temps qui se situe à proximité de sa fête, le 11 novembre, autrefois la date de beaucoup de foires rurales. Selon un texte, l’origine serait à relier au voyage de sa dépouille entre le lieu de sa mort le 8 novembre à Candes et celui de ses obsèques le 11 à Tours qui se serait passé dans des conditions de beau temps exceptionnel…. Aujourd’hui la célébration de l’Armistice et des victimes de la Première Guerre mondiale masque un peu la fête d’un Saint pourtant très vénéré depuis l’époque Mérovingienne. La notion d’été indien, liée aussi à une période de beau temps qui intervient dans l’automne concerne seulement le continent nord américain dans les provinces de l’est du canada et du nord-est des Etats-Unis, et ne se rattache à aucun lien historique ou climatique en Europe…seulement une concordance saisonnière de part et d’autre de l’Atlantique.
Pourtant plus j’analyse le temps du mois de novembre, plus il faut se rendre à l’évidence, l’été de la Saint Martin est une réalité météorologique. Cette année (2006) après la période de températures minimales négatives de la Toussaint au 7 novembre, les gelées disparaissent, les températures maximales se redressent avec un premier maximum qui a lieu le 8 novembre à Roanne, Chambery, Limoges et Saint Etienne où l’on atteint 19,3° ou le 9 novembre à Embrun et Montélimar où le maximum n’atteint que 19,2°. Les températures restent hautes jusqu’au 14 novembre où elles connaissent un second maximum qui dépasse 18° à Embrun et Saint Etienne et atteint 20,3° à Montélimar. Cette période de températures particulièrement douces accompagnées d’un ensoleillement important du 8 au 1O novembre et du 14 et 15 novembre est à peine interrompue par les quelques pluies du 11 et du 12 novembre qui déposent des totaux forts médiocres moins de 4mm avec une légère baisse du thermomètre.
Cette année (2006), cette période de beau temps doit être reliée à une inversion complète des conditions de la circulation générale de l’atmosphère. Au début du mois, une descente froide en provenance des régions arctiques s’est infiltrée jusqu’à nous sur le flanc est d’une barrière anticyclonique atlantique. Depuis le 7, les hautes pressions se sont installées sur les Balkans et la Méditerranée orientale, de ce fait remonte un flux de sud plus ou moins violent qui amène un air tiède en provenance des basses latitude. Ces hautes pressions ont eu un moment de faiblesse du 11 au 13 novembre en laissant passer des perturbations océaniques peu actives et très affaiblies en provenance de l’ouest et du nord-ouest. Dès le 14 les hautes pressions se sont reconstituées, elles résistent sur les Alpes, le vent de sud est revenu parfois violent comme jeudi 16 en raison de cette résistance face à l’air polaire qui voudrait arriver. Une forte pluie méditerranéenne a suivi vendredi (62mm).
Depuis 1986 soit sur 21 ans, c’est la quinzième fois que l’on peut observer un été de la Saint Martin autour de la Fête du Saint soit une probabilité supérieure à 2 années sur 3. Comme l’an dernier (2005) il se décompose en deux phases, l’une un peu avant et l’autre un peu après le 11 novembre. Celui de 2006 semble à classer parmi les plus longs avec 8 jours au moins alors que la durée moyenne est de 2 à 6 jours. Ceux de 1986 et 1997 ont duré 7 jours. Par contre de tels niveaux de températures ont été atteints en 2002 avec 20 à 22° mais aussi en 1998 (19°).
Comme cette année, cette période de beau temps vient souvent après un coup de froid qui se produit autour de la Toussant. Ce fût déjà le cas en 1997 avec -6° à Saint Etienne comme cette année, mais aussi en 1995, 1992, 1990, 1989, 1986, 1987 avec de fortes gelées et dans une moindre mesure l’an dernier en 2005. Il s’agit bien du retour de la douceur après un premier épisode hivernal.
Souvent cet été de la Saint Martin se termine par un fort épisode pluvieux méditerranéen comme celui qui a eu lieu vendredi 17 novembre. Toutefois, ceci se produit souvent dans les jours qui suivent immédiatement le 11 novembre alors qu’en 2006 l’été de la Saint Martin a connu une rallonge inhabituelle. Certains de ces épisodes méditerranéens qui suivent le 11 novembre ont même provoqué des catastrophes. Celle du 13 et 14 novembre 2002, après avoir détruit le pétrolier « Prestige » à l’origine d’une grosse marée noire, et décimé la flotte des multicoques de la précédente « route du Rhum », provoque des grosses inondations sur le Rhône et en Suisse. En 1999 du 12 au 14 se produit la très grosse inondation de l’Aude. Dans une moindre mesure ceci s’est aussi produit en 1996, 1997, 2000 et 2005.
Depuis 1986, on ne dénombre que 5 ou 6 années sans été de la Saint Martin avec une période froide autour du 11 novembre ce qui représente une probabilité inférieure à 30%. Les années concernées sont 1991, 1993, 1994, 2001 et pour la dernière fois 2004 avec pour les deux dernières de fortes gelées et des températures maximales en forte baisse au moment du 11 novembre. L’année 1999 a une situation météorologique incertaine avec des températures maximales qui n’atteignent 10° que le 9 novembre dans une période perturbée sans gelées et peu ensoleillée.
Contrairement à beaucoup de dictons ou de croyances dites populaires sur le climat dont il est difficile d’attester de l’existence scientifique, l’été de la Saint Martin semble être en France une réalité qui se produit au moins deux années sur trois, une probabilité suffisante pour attester de son existence. C’est d’autant plus net que les critères que nous avons retenus pour le déterminer ou non sont stricts : absence de gelées, températures maximales supérieures à 10°, précipitations faibles ou nulles.
Gérard Staron vous donne rendez vous samedi prochain sur les ondes de Radio espérance, texte repris sur Zoom42.fr
Commentaire actuel :
En 2006, pour la chronique ci-dessus, cette période de beau temps s’est inscrit dans le cadre d’un automne particulièrement doux.
Après 2007, où l’été de la Saint Martin a été inexistant avec l’arrivée d’une vague de froid et de neige, 2008 semble renouer avec la tradition.
La période de douceur des températures s’étend jusqu’à la fête du Saint, mais risque de disparaître dès le lendemain.
De plus, cette année, l’épisode pluvieux méditerranéen du week-end de la Toussaint a précédé et non suivi l’été de la Saint Martin.
Gérard Staron http://pagesperso-orange.fr/climatologie.staron