Chronique ancienne n°135 . La formation de la grêle, Avec Gérard et Marie-Gabrielle.
Texte d’origine
Le 21 juin, un solstice d’été pluvieux a perturbé la Fête de la musique. Nous avons relaté la semaine dernière les évènements orageux de Normandie. Dans ce même thème des orages nous allons tenter d’éclaircir, je crois, un météore qui est souvent associé, la grêle.
Pour comprendre la façon dont nait et se développe le phénomène, il convient peut être de décrire un grêlon qui se serait cassé par le milieu. On découvre alors au centre un noyau opaque formé autour d’un grain de grésil. Autour, des couches concentriques alternativement transparentes et non transparentes l’entourent. Enfin, l’enveloppe extérieure est le plus souvent transparente et supporte parfois accolée des cristaux de glace parfaitement formés, de grosse dimension qui ne peuvent être assimilés à de la neige.
- Dans cette composition du grêlon peut-t-on déceler les secrets de sa fabrication à l’intérieur d’un nuage très agité : le cumulonimbus ?
Comme je vous l’ai décrit lors de chroniques précédentes le cumulonimbus est un nuage qui présente un fort courant ascendant. Ce dernier propulse les gouttelettes qui le composent à haute altitude et dans des régions où les températures de l’atmosphère sont nettement négatives. A ce niveau, peu à peu les gouttelettes vont se transformer lentement en cristaux de glace. Ce mécanisme s’effectue très progressivement car beaucoup de gouttelettes restent liquides en surfusion dans les températures négatives et ces particules liquides viennent s’agglutiner progressivement sur les cristaux qui ont déjà congelé pour qu’ils grossissent. En temps ordinaire, ceci donne de la neige, mais dans l’atmosphère de forte instabilité, avec un mouvement ascendant violent qui envoie les gouttelettes à des niveaux de très basse température, il se produit une saturation et une surfusion avec de très nombreuses gouttes de pluies par rapport aux cristaux de glace. Ces derniers sont littéralement enrobés d’eau de pluie qui se congèle à leur contact, la croissance de ces cristaux de glace est anormale, ceci donne de la grêle.
Le centre du grêlon formé de ce noyau opaque, c’est déjà le début du mécanisme de développement très rapide puisqu’il s’agit de grésil ou de neige roulée. C’est déjà des cristaux de glace renforcés de gouttelettes d’eaux microscopiques qui se sont agglutinés en surfusion dans le nuage avant de congeler.
Les couches que l’on trouve autour de ce noyau correspondent aux différents amas de gouttelettes ou de cristaux qui sont venus s’agglutiner brutalement autour du noyau du grêlon dans le nuage en surfusion.
- Dans ces conditions, pourquoi les couches successives sont-elles alternativement transparentes et non transparentes ?
Ceci tient aux conditions dans lesquelles elles sont mises en place. Quand les couches sont transparentes, ceci signifie que le grêlon s’est trouvé à un certain moment enveloppé d’une petite masse d’eau liquide qui s’est congelé sans introduction de bulle d’air, soit sans soudaineté ou que la masse d’eau était importante.
Sur cette couche transparente une fois solidifiée, de petits cristaux de glace ou de grésil déjà formés se déposent et constituent la couche blanche non transparente.
- Comment ces deux phases peuvent elles se produire dans le cumulonimbus puisque ceci suggère que les deux phénomènes se passent à deux étages du nuage où les conditions thermiques sont différentes ?
C’est bien le cas, le grêlon naissant subit l’attraction de deux forces, celle du mouvement ascendant du nuage qui le propulse vers les hautes altitudes où se trouvent les cristaux de glace et de grésil, et son poids qui le fait retomber en direction du sol. Notre jeune grêlon avant de choir au sol fait le yoyo très longtemps entre les deux parties du nuage. Propulsé vers les hauteurs, il reçoit une couche de cristaux translucides. Descendant vers la base du nuage, il est ceinturé de la couche transparente de gouttelettes. A chaque aller et retour vertical, il reçoit une couche supplémentaire qui le rend plus lourd et l’attire vers le sol.
Plus le cumulonimbus se développe, plus le courant ascendant violent se renforce et renvoie le grêlon vers le haut du nuage. Ceci dure jusqu’à ce que l’équilibre soit rompu, que le poids du grêlon soit suffisant pour entrainer sa chute jusqu’au sol. Plus, ce mécanisme d’aller et retour dans le nuage, maintenu par la forte ascendance, dure longtemps, et plus la taille et le poids du grêlon sont fortes.
- On parle souvent de grêlon ayant la taille d’une noix, d’un œuf de pigeon ou même d’un œuf de poule, quelles dimensions peuvent atteindre les grêlons ?
Ils ne dépassent pas, le plus souvent, 2 à 3cm de diamètre, mais les records sont biens supérieurs et sont tous situés dans les régions continentales où l’accumulation et l’ascendance de l’air chaud en été est la plus forte et la plus brutale, comme dans les exemples qui vont suivre. Dans notre région centre-est, un orage dans le département de l’Ain, le 2 juillet 1898 aurait déposé des grêlons de 500 à 800 grammes et de diamètre de 8 à 10 cm. Le record en France serait de 950 grammes tombés en août 1955 dans la région de Strasbourg. Le record du monde se situerait dans le Kazakhstan en pleine Asie centrale où un grêlon de 1,4 kg serait tombé. Même si la mesure du poids d’un grêlon est toujours difficile (fusion rapide, coalescence au sol avec d’autres grêlons) voilà des projectiles qu’il ne vaut mieux pas recevoir sur la tête.
Que ceci ne vous empêche pas de nous retrouver vendredi prochain, chers auditeurs, pour une nouvelle chronique de climatologie.
Commentaire actuel :
Les orages de grêle sont surtout dévastateurs en milieux urbains ou dans les régions viticoles et fruitières. Ce printemps de nombreuses villes comme Toulouse ont été concernés. Les vignobles du Madiran ont été hachés.
En campagne, il existe peu de remèdes efficaces pour éviter les dégâts. (Peut être une prochaine chronique ancienne sur ce blog)
En ville, les toits des locaux industriels et commerciaux sont les plus affectés. Pour en savoir plus :
Gérard Staron « Le ciel tomberait-il sur nos têtes ? » 2003 Editions Aléas 15 quai Lassagne 69001 Lyon, chapitre III pages 106 à 108