Chronique N°935
Il a été annoncé à grands renforts de trompes une canicule au debut de cette semaine. Elle a fait la une de tous les journaux télévisés, les maximums devaient partout dépasser 35° et les minimums se situer largement au-dessus de 20°. Les informations étaient consacrées aux mesures d’urgence à pratiquer face à un risque sanitaire majeur !
Nous avons connu effectivement une vague de chaleur, mais il est intéressant de vérifier si les mesures de températures ont correspondu aux alarmes entendues.
Pour les maximums, les températures deviennent particulièrement chaudes le dimanche 21 juillet. On dépasse sur une grande partie du pays les 30° à l’exception de la pointe de la Bretagne, du Cotentin, les côtes de la Mer du Nord et des régions de montagnes des Alpes, du Jura, des Vosges et du Massif central, bassins. Les 35° ne sont atteints que sur des points très restreints du territoire, Bordeaux et une partie des landes et les plaines du Bas Rhône au niveau de Carpentras et Orange.
Le lundi 22 correspond à la journée la plus chaude. La plus grande partie du pays dépasse 30°, mais les mêmes régions que la veille sont en dessous de ce seuil sur les côtes de la Manche, de la mer du Nord et les régions de montagne. Seul augmente l’espace géographique dépassant 35°. Il comprend la vallée du Rhône de Lyon à la mer, le val de Loire de Touraine et d’Anjou avec des extensions sur la Beauce, les plateaux de l’Yonne et du Berry. La région parisienne se situe en limite de ce seuil.
Ces deux journées la ville la plus chaude de France est Carpentras entre 36 et 37°.
Dès le mardi 23, la tendance passe à la baisse. 30° ne sont plus atteint sur un grand « ouest » qui déborde jusqu’au Poitou à la région parisienne et au Nord auquel il faut ajouter l’ensemble des régions de Montagne, Piémont Pyrénéen Y compris. Seuls Orange dépasse 35° et Carpentras 36°.
Le 24 le recul de la chaleur est confirmé sur une grande moitié septentrionale qui repasse en dessous de 30° sauf exceptions (Nevers et Bourges). Il faut ajouter comme précédemment l’ensemble des régions montagneuses.
L’annonce de canicule a donc « accouché d’une souris » au niveau des maximums, autant pour la durée (1 ou 2 jours) que pour son intensité ( toutes les stations en dessous de 36° sauf Carpentras) . Il en a été de même au niveau des températures minimales annoncées si élevées. Le décalage entre l’annonce et la réalité est à ce niveau encore plus flagrant.
Le dimanche 21, on ne dépasse 20° que sur une partie des côtes méditerranéennes, le Roussillon et la Côte d’Azur. La plus grande partie du pays est en dessous de 18°, seuil à partir duquel on considère que l’organisme humain ressent le froid !
Les températures minimales les plus hautes ont été mesurées lundi 22, mais à l’exception de l’agglomération parisienne, tous les minimums au-dessus de 20° se situent dans une grande moitié méridionale avec les côtes de l’Atlantique, le Val de Loire angevin , l’agglomération lyonnaise et naturellement le Bassin aquitain et les régions méditerranéennes. Une grande partie du pays reste en dessous de 18° et pas seulement les régions de montagne, puisqu’il faut ajouter le grand « ouest » et la partie nord du Bassin Parisien.
Le 23, les minimums repartent à la baisse et à l’exception de points isolés des agglomérations parisiennes et Lyonnaises, on ne trouve 20° que dans le Bassin aquitain et les régions méditerranéennes. La plus grande partie du pays est passée en dessous de 18°.
Le 24, l’ensemble de la France est compris entre 15 et 18°. Les 20° ne concernent que quelques secteurs du Bassin Aquitain et des côtes méditerranéennes, le moins que l’on peut espérer en cette saison dans ces secteurs du midi
Le mot canicule a donc été utilisé d’une façon hâtive pour désigner un épisode de forte chaleur certes, mais qui ne peut en aucun cas être comparé avec ceux qui méritent véritablement ce qualificatif. Rien de comparable en effet avec les températures du 19 août 2012, ou de façon plus lointaine avec celles des été 2005, 2006 sans parler de d’août 2003 et du 31 juillet 1983 qui avaient dépassé les 40° sur une grande partie de la France. Le plus surprenant, les seuils retenus depuis 2003 pour lancer les alertes de canicule n’ont quasiment jamais été atteints.
Une fois de plus le rôle de Paris peut être évoqué avec deux aspects. Les fortes chaleurs ont été incontestablement aggravées par le phénomène urbain. Le centre de la capitale a dépassé 35° de maximum et 23° de minimum le lundi 22 juillet (Paris Monsouris), jour le plus chaud alors que les températures ont été bien plus basses dès que l’on sort de l’agglomération. Dans une moindre mesure, ce rôle de la ville pour aggraver les fortes températures, minimums comme maximums peut être évoqué dans le cas de Lyon les 22 et 23 juillet. L’ilot de chaleur urbain est connu en météorologie, mais il est plus souvent prouvé et important en cas de basses que de hautes températures.
Le second aspect concerne le rôle centralisateur de Paris dans notre pays. Autrefois, notre organisme de météorologie aux noms changeants au fil de l’histoire était souvent critiqué pour ne réaliser ses prévisions qu’en fonction de la capitale. Lors de ce dernier épisode, cette dérive a-t-elle été remise à l’ordre du jour ? Le plus cocasse est qu’aujourd’hui Météo France a déménagé à Toulouse et que les prévisions sont faites à partir de la cité des violettes.
Plus sérieusement qu’est-ce qui peut expliquer ce décalage entre l’annonce de la canicule et un fort épisode de chaleur sans aucun aspect exceptionnel ?
Il semble que les modèles météorologiques ont minoré un facteur : l’importance des orages. Ces derniers ont été beaucoup plus nombreux que prévus les deux jours où la vague de fortes températures était à son paroxysme soit le dimanche 21 et le lundi 22 juillet.
Nous nous trouvions alors dans une situation de transition entre la disparition de l‘anticyclone des iles britanniques qui nous apportait un flux de nord-est qui limitait les températures et l’arrivée des premières perturbations atlantiques qui ont atteint la France mardi avec les forts orages.
Pendant ces deux jours du 21 et du 22 juillet, les pressions élevées n’ont pu empêcher le développement à partir de la mi-journée de cellules orageuses. Les images de satellite transmises par Claude montrent que ces deux jours la France est un pointillé de ronds blancs matérialisant les orages. Ces derniers ont touché les zones de montagnes, mais le lundi 22, ils se sont aventurés sur de nombreux secteurs de plaines de l’ouest ou du Bassin parisien.
Ce développement orageux a été bien au-delà de ce que les modèles les plus visionnaires avaient annoncés. Dans un monde où le résultat du modèle prévisionnel prime sur la mesure, ou le sondage prime sur la réalité, il n’en fallait pas plus pour que la prévision se transforme en information pour les médias sans avoir vraiment lieu.
Ces orages provoquent toujours une forte chute de température prématurée dans la journée au moment de la précipitation et dans les régions voisines, le développement des masses cumuliformes obtient un résultat approchant par baisse de l’ensoleillement.
Au moment où vous m’écoutez, un nouveau pic de chaleur a lieu, a-t-il cette fois été minoré à cause des orages ou non ? Il est particulièrement ventilé, une alerte vent aurait peut –être été plus judicieuse : près du seuil de la tempête à Lyon Bron
Il en est en météorologie comme en politique, la prévision ne saurait remplacer la mesure ou l’observation comme le sondage ne saurait remplacer l’élection !
Gérard Staron vous donne rendez-vous samedi sur Radio Espérance , bonne vacances