Chronique N°892
Le mois de septembre poursuivant son cheminement sans grande modifications, même si la situation s’agite dans les heures qui viennent, des circonstances diverses me poussent à aborder le problème de l’énergie éoliennes avec une question au demeurant souvent éludée : Electricité : peut-on compter vraiment sur l’éolien ?
Je suis en effet extrêmement surpris de constater que tout le débat fort agité que j’entends porte sur des questions de forme, qu’il s’agissent des problèmes d’intégration dans le paysage en raison du bruit ou de l’esthétique sur des sites souvent signalés pour leur beauté et leur caractère sauvage ou de raisons moins avouables parfois entendues, qu’ils s’agisse aussi de problèmes administratifs avec des dossiers acceptés ou recalés pour des problèmes de forme juridique. Presque jamais, ne sont évoquées les questions de fond à savoir quels apports l’énergie éolienne peut-elle fournir à la satisfaction de nos besoins électriques ? Les problèmes sont importants, assez proches de ceux du solaire.
Je suis totalement éberlué chaque fois que l’on présente une réalisation, d’entendre l’annonce que l’équipement servirait à satisfaire à la consommation de tel village ou ville ou équipement. En effet, ce simple rapport entre une production même réelle et une consommation tout aussi vérifiée ne peut être que fausse en raison des caractéristiques techniques de l’énergie éolienne mais aussi de la consommation électrique.
Pour l’énergie éolienne, il y a d’abord le rapport entre la production réelle et la puissance installée. Ce dernier ne dépasse pas 30%. En France, après 2000, le facteur de charge a atteint 22% après avoir été pendant longtemps inférieur à 20%.
La puissance d’une éolienne dépend de la formule suivante : P = 0.37*S (surface des pales)*V3 (le cube de la vitesse moyenne du vent). Sa dépendance est très forte des aléas du ciel. Pour démarrer, l’éolienne a besoin d’une vitesse minimale de 10 à 15 km/h environ 4 m/s. la puissance maximale se produit vers 55 km/h soit 16 m/s mais on peut considérer qu’au-dessus de 7 à 8 m/s, vers 25 à 28 km/h on se situe en pleine puissance.
L‘avantage d’avoir de bonnes archives météorologiques permet de confronter ces données techniques avec les mesures de vent sur les plateaux du Velay et à proximité du massif du Mézenc. Même si les éoliennes vont chercher le vent le plus haut possible, les mesures météorologiques prises au sommet d’un mat de 10 mètres sont parfaitement représentatives. Il s’agit aussi de prendre les vitesses moyennes sur 10 minutes car la production éolienne a besoin de régularité et déteste les rafales isolées
J’ai effectué les calculs sur une moyenne de 5 ans de 1995 à 1999. J’ai constaté qu’au Puy Loudes à 830 m d’altitude, la vitesse de 8m/s correspondant à la production maximale possible n’était atteinte que pendant 2.5% du temps, celle supérieure à 5m/s soit un bon fonctionnement correspond à 22% du temps. Le reste soit 78 % du temps présente des vitesses moyennes jusqu’à 4m /s soit une utilisation impossible ou très médiocre
Quand on s’approche des sommets avec Landos à 1148 m ou au Mazet saint Voy à 1130 m d’altitude, la rentabilité s’améliore, on trouve respectivement 8.5% et 9.6% de vitesses supérieures à 8m/s pour un production maximale, 39.8% et 40% de vitesses supérieures à 5m/s susceptible de fournir de l’électricité , mais encore 60% environ d’utilisation médiocre ou impossible jusqu’à 4m/s.
Ce rendement parait faible, pourtant je puis vous assurer que dans l’entourage des stations citées et à des altitudes semblables tout le monde peut constater la présence d’équipement éolien, mais le problème majeur n’est pas là.
A l’exception de la prévision à très court terme, celle que vous consultez sur mon blog à quelques jours, il est impossible de savoir quand cette production éolienne va intervenir. Difficile de savoir comment la production éolienne va s’insérer dans l’ensemble des centrales qui fournissent l’électricité, surtout pas au niveau saisonnier ou mensuel. A titre d’exemple, au moment où je rédigeais cette chronique, soit jeudi matin vers 10 heures, à la fin de la pointe du matin, la carte des vitesses moyennes du vent sur la France montrait que ces dernières étaient inférieures à celles nécessaires au simple démarrage de la production sur l’ensemble du pays, sauf la Côte d’Azur qui gardait les restes de l’action de la dépression du golfe de Gènes. Il est vrai, que la France était recouverte par l’anticyclone des Açores et les hautes pressions ne sont pas favorables au vent et donnent des temps calmes. Le ciel agité nécessaire au fonctionnement des éoliennes accompagne les systèmes perturbés surtout dans la partie située au sud du centre de la dépression, et il n’y en avait pas en vue sur notre pays ce jeudi matin !
Le problème majeur : cette très grande irrégularité doit être mise en relation avec une autre très grande variation non maitrisée, celle de la consommation électrique. En effet l’électricité est une énergie que l’on ne peut pas stocker en masse et la production doit s’adapter en continue à la consommation augmentée des pertes liées au transport de l’énergie.
Depuis le début de son existence, la production d’électricité se fait à partir d’une autre énergie stockée dans l’attente d’être transformée au moment nécessaire en électricité. Les énergies fossiles dans une centrale thermique, l’uranium dans la piscine de sa centrale nucléaire, l’eau dans son barrage attendent le moment de leur transformation en courant électrique pour faire face aux pointes quotidiennes ou saisonnières de consommation !
Le moment le plus critique de ce problème se situe lors des records de consommation toujours en début de soirée vers 19 heures, lors des grosses vagues de froid hivernales. Il faut à ce moment que la puissance disponible soit au moins légèrement supérieure à la consommation. Peux –t-on compter à cet instant sur la production éolienne ? Je vous renvoie à la CHRONIQUE DE CLIMATOLOGIE N° 664: Les éoliennes et la consommation électrique qui analyse le vent en France au moment des records de consommation électrique. La réponse était très partielle, pour une raison simple, les grands froids arrivent souvent avec l’anticyclone sibérien aussi calme que les autres ! Encore notre pays, en raison de sa pluralité climatique n’est pas le plus mal loti. Il peut y avoir du vent près de la Méditerranée quand il n’y en a pas vers l’Atlantique ou la Manche et inversement !
En plus Le solaire a les mêmes problèmes que l’éolien lors des grands froids. Les pays voisins ont souvent les mêmes conditions climatiques que nous et les échanges d’énergies sont plus difficiles en situation tendue. Les systèmes de pompes à chaleur, les chaudières à accumulation et l’isolation très économes en énergie en situation normale perdent aussi une part de leur rendement lors des très grands froids. C’est pour cette raison que les périodes de consommation record posent de plus en plus de gros problèmes d’alimentation électrique en particulier en Bretagne et en Provence côte d’Azur ces dernières années avec des risques croissants de coupures du courant. Le retour des restrictions électriques !
Compter sur l’énergie éolienne, c’est acheter un billet de loterie , les chances de gagner sont un peu plus fortes que pour le loto ou l’euro millions, mais sa production aléatoire est difficile à combiner avec une consommation tout aussi variable dans le temps ! les solutions palliatives au problème sont recherchées mais pas encore satisfaisantes , trop de temps seraient nécessaire pour les présenter !
Gérard Staron vous donne rendez-vous Samedi prochain sur Radio espérance … Bonne semaine !