Attention samedi vers 19 h : chute de neige en cours sur le plateau de Saint just Malmont, chaussées recouvertes!
Chronique N° 859
Alors que les médias multiplient dans leurs commentaires les discours sur la douceur, la rigueur n’est pas très loin dès que l’on franchit nos frontières de l’est.
Les Alpes accumulent des quantités énormes de neige au-dessus de 1500 mètres alors que notre Massif central subit une indigence notoire.
Au début décembre, le manteau était quasiment nul jusqu’à plus de 2500 mètres sur les Alpes, les épaisseurs atteintes aujourd’hui s’approchent des niveaux des années très abondantes.
Les massifs qui concentrent les couches les plus hautes correspondent aux Préalpes de part et d’autres de la frontière entre la Suisse, l’Allemagne et l’Autriche.
A Santis, la couche atteignait déjà 3 m au début de janvier, elle atteignait 3.90 m le 10 janvier. La hausse a repris ces derniers jours et au début de cette semaine on dépassait 4.71 mètres au début de la semaine
Dans les Préalpes de Bavière ou du Tyrol entre Munich et Innsbruck, la couche dépassait 3.30m le 8 janvier, atteignait 4 m le 10 janvier et actuellement dépasse les 5 mètres.
Dans ces régions, dès la grosse chute du 8 au 10 janvier, les records de neige fraiche pour un mois de janvier étaient parfois dépassés. En Suisse c’était le cas à Ulrichen avec 2,55 m battant l’épaisseur de 1951. En Autriche, les 195 cm de 1951 étaient approchés à Galtur à la même date avec 190 cm, les nouvelles couches ont dû combler cette petite différence ! Les 330 cm de Langen et Strocken tombés en 1968 au Tyrol et les 260 cm d’Arosa en 1951 et les 225 cm d’Andermatt en 1982 en Suisse n’étaient pas encore battu le 10 janvier mais les couches ultérieures s’en approchent
Sur le reste du massif, les épaisseurs présentent une très forte dissymétrie entre le nord et le sud. La plus part des sommets préalpins suisse autrichiens et Allemands dépassent les 3 mètres alors que l’on tombe très vite à des valeurs bien plus faibles du côté Italien ou tessinois. A altitudes quasiment égales vers 2500 mètres le Weissfluhjoch près de la frontière italienne a une épaisseur qui dépasse à peine la moitié de celle de Santis, 2.54 m contre 4.71 m à la date du 25 janvier.
Les reliefs hercyniens en avant des Alpes du nord accumulent aussi des quantités de neige très importantes. C’est ainsi que l’épaisseur atteint 1.60 sur le Fichtelgebirge sur les hauteurs du quadrilatère de Bohème , mais aussi 1.20 m au Feldberg sur les sommets de la Forêt noire. Dans les deux cas les altitudes sont très inférieures à celles des reliefs du massif central avec de l’ordre de 1100 à 1200 mètres dans les deux cas.
Dans ces mêmes régions en avant des Alpes en direction du nord, les précipitations sont tombées sous forme de pluie aux altitudes plus basses, les totaux déposés sont impressionnants et répétitifs avec les épisodes de la tempête Andréa celui du 8 au 10 janvier, puis du 19 au 22 (plus de 140 mm localement) et enfin celui de cette semaine. Cette accumulation de précipitations provoque la montée des rivières. Celles descendant du Jura Souabe et de Franconie ont déjà connu des pics dépassant 3 mètres comme la Kocher ou la Fils. La Rednitz à Kartzwang est montée de plus de 5 mètres. Le Rhin et le Danube ont amorcé une crue qu’il conviendra de surveiller si les épisodes pluvio-neigeux continuent.
De part et d’autre de cette zone centrale alpine, les couches neigeuses diminuent avec toutefois une dissymétrie importante. Les Carpates sont plus enneigées à l’est que les Alpes du nord Française. En France, les couches les plus importantes correspondent au massif du Mont Blanc et au Chablais, cette zone a même augmenté fortement sa couche lors de l’épisode du 20 au 22 janvier. Les épaisseurs baissent dans les autres reliefs des Alpes du nord, les Alpes du sud sont très peu enneigées.
Pendant ce temps là, notre massif central est particulièrement démuni de manteau blanc. L’altitude de base du manteau neigeux a peu varié dans notre région. Sur le Mézenc, la partie au-dessus de 1500 mètre était blanche le 15 janvier et rien n’avait vraiment changé le 22 janvier ! Jusqu’aux flocons de la fin de cette semaine, la variation a encore été très faible !
Ce n’est pas le premier hiver où les Alpes croulent sous un très épais manteau blanc alors que le Massif central en est très largement dépourvu !
Lors de l’hiver 1974-75 à fin janvier, l’épaisseur pour la tranche d’altitude 1500 à 1800 mètres donnait en moyenne 1.69 m pour les postes de la Haute Savoie, 1.05 m pour ceux de Savoie, 79 cm pour ceux du Dauphiné, 40 cm pour les Alpes du sud et moins de 20 cm pour les postes du Massif central. Lors du même hiver et pour la même tranche d’altitude, les écarts étaient encore plus forts à la fin du mois de mars, de 3 mètres en Haute Savoie à 40 cm sur le Massif central.
Un paradoxe oppose cette faiblesse de la neige sur notre Massif central, aux très grosses couches qui sont aussi déposées depuis le début du mois de janvier sur les Chaines montagneuses des Balkans jusqu’au Pinde en Grèce et de Turquie. La Bulgarie a même été noyée sous plusieurs mètres dans la région de Sofia par les restes de la tempête Andréa continuant sa route.
Comment expliquer cette abondance de neige qui s’accentue de jours en jours sur les Alpes Suisses et germaniques et cette faiblesse sur le Massif central ?
Les altitudes plus basses certes, mais surtout l’Europe est découpée en 3 tranches météorologiques depuis le début du mois de janvier. L’anticyclone des Açores avec ses températures douces recouvre la péninsule Ibérique et déborde sur l’ouest de la France.
L’anticyclone sibérien particulièrement froid avec des températures souvent inférieures à -20° à Moscou occupe toute l’Europe orientale à partir de la Pologne. Les pressions sont extrêmement élevées au sol avec plus de 1055 hpa sur la Russie.
Entre les deux descendent des perturbations en provenance de l’Atlantique nord. Elles apportent beaucoup d’humidité qu’elles ont récupérée sur l’Océan et séparent ces mastodontes selon une trajectoire de la mer du Nord au Golfe de Gènes et à l’Italie. Les Alpes centrales et surtout leur versant nord reçoivent de pleine fouet ces masses pluvio-neigeuses de la Suisse alémanique au Tyrol. Dans ce secteur, ces précipitations entrent en contact avec l’air froid situé sur l’est de l’Europe et elles se produisent sous forme de neige à des altitudes assez basses.
Plus à l’ouest sur la France, les précipitations s’atténuent plus on s’éloigne de cette diagonale Mer du nord / Golfe de Gènes, et elles frappent surtout le nord-est du pays des Ardennes à la région Rhône Alpes avec quelques extensions sur l’est du Massif central sur l’angle au-delà du haut Forez au Pilat. Au contact, de l’anticyclone des Açores, ces régions sont le plus souvent dans le secteur chaud des perturbations et le passage de la pluie à la neige s’effectue à des altitudes plus élevées.
Ces perturbations après avoir traversé les Alpes reprennent ensuite de la Vigueur en traversant les Balkans puis sur la Méditerranée orientale.
Cette géographie est assez stable depuis le début du mois et explique les 3 tranches de l’Europe de ce mois de janvier, douceur au sud-ouest jusqu’à la France, fort enneigement sur les Alpes centrales avec fortes précipitations et inondations au nord du massif, débordement des conditions hivernales jusqu’aux Balkans et froid très vif à l’est du continent.
Ce dernier donne des signes d’avancer jusqu’à nous, le fera-t-il comme en février 1956 !
Gérard Staron vous donne rendez-vous samedi prochain sur les ondes de Radio Espérance !