Chronique N°829
Notre pays reste celui du rêve idéologique, souvent décalé par rapport à la réalité visible et entretenu par ceux qui s’autoproclament « les élites »…
Nous pouvons en observer les caractéristiques en climatologie mais aussi dans d’autres domaines de l’actualité.
C’est d’abord le maintien du discours sur la sécheresse ou dans le meilleur des cas, quand on ne peut nier la pluie, signaler son insuffisance. Depuis les derniers jours de mai, toutes les régions de France ont connu des arrosages conséquents. Presque partout, la pluviométrie de ce début du mois de juin est supérieure à celle de la totalité du mois de mai, parfois même du total de mars à mai. Toutes les régions ont connu tour à tour des arrosages substantiels et certaines stations ont même déjà dépassé en une quinzaine la pluviométrie moyenne de la totalité du mois. Une grande partie de la moitié est de la France a reçu de l’ordre de 50 mm avec même 75 mm à Ambérieu, 71 mm à Chambéry, 90 mm à Rouen. La région parisienne n’a pas été oubliée avec plus de 48 mm à Paris et 65 mm à Melun. La Bretagne a attendu un peu plus longtemps mais le ciel a été généreux à Brest avec 68 mm. Le midi méditerranéen en particulier de Marseille à la Côte d’azur a reçu aussi des quantités substantielles. Il semble que la seule région oubliée ait été celle de Paray le Monial puisque la station de saint Yan n’a comptabilisé que 5 mm dans la première quinzaine du mois, mais jeudi a contribué à doubler le total. Il ne passe pas de journée sans qu’une partie de notre pays ne reçoive un arrosage. En début du mois ce fût plutôt une moitié méridionale avec des remontées pluvieuses du Bassin aquitain au nord-est. Depuis cette semaine le nord voit défiler les perturbations qui déposent leurs millimètres de la Bretagne au Jura. La situation atmosphérique semble continuer sur ces dispositions pluvieuses et samedi les totaux auront encore enflé quand vous m’entendrez.. Juin est parti pour connaitre une pluviométrie nettement supérieure à la normale sur une grande partie du pays, la première fois depuis le début de l’année civile, pourtant il faut nous habituer à entendre le martelage de la sécheresse.
L’autre domaine qui fait aussi l’objet d’un rêve idéologique correspond à l’admiration qu’inspirent les révolutions de l’Afrique du nord et du Proche Orient à nos élites. L’historien a déjà effectué une comparaison des événements survenus dans ces pays depuis le début de l’année avec les révolutions de 1848 en Europe. La similitude se confirme jour après jour mais on semble pourtant oublier « les leçons de l’histoire » qui accompagnent régulièrement ces événements depuis que la France a montré un chemin très chaotique en 1789.
Après l’action, il y a toujours la réaction souvent très sanglante et victorieuse car elle oppose des régimes dictatoriaux militairement très équipés et rompu à toutes les formes de répressions et des foules désorganisées et peu armées. Comme je vous le signalais dans une précédente chronique, il est facile de renverser des semi-dictateurs qui rechignent à utiliser longtemps la force contre leur peuple. Par contre les véritables tyrans ne reculent devant aucun moyen quel que soit le nombre de victimes pour maintenir leur pouvoir. Les événements de Libye, de Syrie, du Yemen sont d’excellents exemples. Toutes les révolutions depuis 1789 montrent, qu’après une première phase qui peut paraitre sympathique, une seconde s’accompagne de massacres énormes. Les Français ont pu célébrer 1789, mais il était préférable de se taire à propos de la terreur de 1793. En 1830 la révolte de la Pologne est matée dans le sang. En 1848 ce sont celles de l’Italie, de la Hongrie. Après 1917, l’installation du régime de Lénine fait plus de 20 millions de morts entre 1919 et 1921. L’euphorie de février 1848 en France se termine par les journées sanglantes de Juin de la même année. Etc…
La seconde leçon de l’histoire : même dans les pays où les révolutionnaires croient avoir gagné la partie, quelques mois plus tard, ceux qui récupèrent le pouvoir sont très rarement ceux qui sont à l’origine du processus.
D’abord quand des élections sont prévus, les mouvements à l’origine de ces révolutions demandent souvent leur report de façon à apprendre aux populations à bien voter ce que l’on appelle pudiquement « éduquer à la démocratie », car ils craignent d’être mis en minorité. Cette demande de repousser la date des élections en Tunisie ou dans une moindre mesure en Egypte, a été exactement la même de celle des républicains en 1848 en France. Ce report ne peut pourtant pas être fait indéfiniment car il pérennise des pouvoirs provisoires sans grande légitimité autre que la rue. D’autres ont longtemps attendu les élections libres promises par les mouvements révolutionnaires à la fin de la seconde guerre mondiale, ou la Russie après octobre 1917 !
Qui aurait pu penser au début des mouvements qu’ils auraient pu aboutir aux pouvoirs qui se sont réellement installés !
Que la révolution française déboucherait sur l’Empire de Napoléon Bonaparte
Que celle de 1830 mettrait au pouvoir à Paris un roi des Français et à Bruxelles un roi des belges, installés d’urgence pour éviter la république
Que celle de 1848 se terminerait par la victoire du parti de l’ordre puis par le Second Empire en France
Que celle de février 1917 en Russie, permettrait ensuite 70 ans de communisme !
La litanie pourrait–être prolongée ?
Enfin la dernière leçon de l’histoire, complètement oubliée, est l’amplification des crises et même parfois les effondrements économiques à la suite des révolutions. La Tunisie et l’Egypte en font d’autant plus l’amère constatation, que leur principale activité « Le Tourisme » dépend de l’arrivée de visiteurs qui renoncent à la moindre situation troublée.
Même sans cet handicap supplémentaire, l’histoire regorge d’exemples de situations économiques catastrophiques après les révolutions.
Après la révolution française, l’économie française est exsangue. Bordeaux 2ème port mondial en 1788 connait un trafic cent fois inférieur 10 ans après. Aujourd’hui il n’a pas retrouvé son rang du XVIIIème siècle. L’économie maritime est ruinée. Saint Etienne principal centre industriel avant la révolution doit totalement reconvertir ses activités. Il faut attendre 1799, pour que l’économie commence un léger redémarrage. La monnaie, l’assignat, le mandat territorial, ne valent plus rien et il faut attendre la création du Franc germinal pour que notre pays retrouve une stabilité monétaire !
En 1848, la crise économique commencée en 1846 par la maladie de la pomme de terre et les mauvaises récoltes de céréales, se poursuit tant que la situation politique reste troublée soit le début du Second Empire.
La révolution de 1917 en Russie fait place à une famine qui fait mourir 5 millions d’ouvriers de faim. 1921 est surnommée l’année nue. « la production industrielle n’est qu’un septième d’avant guerre, la production de fonte représentait seulement 3% de celle de 1913, pas de combustibles, les chemins de fer étaient paralysés : matériel hors d’usage »
Les historiens et les élites politiques ou intellectuelles sont souvent plus zélés à présenter les conditions économiques et sociales difficiles qui précèdent les mouvements révolutionnaires qu’à faire état de la persistance ou de l’aggravation qu’ils provoquent. Vous avez tous appris les difficultés de la paysannerie ou des villes en 1788, mais vous a-t-on fait connaitre leur état quelques années après ? La même attitude recommence en 2011 avec la Tunisie ou l’Egypte !
Que ce soit en climatologie, sécheresses aujourd’hui, ou dans d’autres domaines, notre pays aime bien vivre dans un rêve idéologique, et surtout aduler ceux qui les maintiennent dans cette torpeur décalée des réalités ou qui les incitent régulièrement à la révolution ou selon « un coup de pub » plus récent à l’indignation. Les réveils donnent souvent la gueule de bois !
Gérard Staron vous donne rendez vous samedi prochain sur les ondes de radio Espérance, cette chronique étant reprise sur le blog : gesta.over-blog. Com. Bonne semaine