Les orages du précédent week-end ont présenté un résumé de toutes les interrogations que peuvent apporter ces événements climatiques brutaux.
Nous avons eu un panel de tous les désagréments possibles : inondations localisées dans le sud de la Corrèze et la région stéphanoise, traînée de grêle épaisse sur les plateaux du Velay au dessus du Puy vers l’aéroport de Loudes, coup de foudre dévastateurs en région parisienne sur les caténaires de la SNCF paralysant le trafic à partir de la Gare d’Austerlitz.
Ce dernier événement a eu le plus d’impact sur la vie de nos concitoyens avec la circulation des trains et des RER, pourtant le coup de foudre s’est produit au moment où les orages commencés la veille en soirée, perdaient peu à peu de leur vigueur.
C’est d’abord visible au niveau des précipitations déposées au cours du déplacement des masses orageuses qui remontent, comme d’habitude du sud-ouest, soit dans ce cas du sud du Limousin jusqu’à la région parisienne. Les totaux du vendredi en soirée culminent en déposant 71 mm à Brive-La-Gaillarde dans le sud du département de la Corrèze. En remontant vers le nord-est, au cours de la nuit, les orages ont déposé de moins en moins de précipitations, on retrouve 48 mm à Guéret, 35 mm à Orléans, 30 mm à Melun, 24,2 mm à Orly et 15 à 20 mm sur Paris. C’est un coup de foudre dans un orage finissant dans la matinée qui suit qui a provoqué les difficultés majeures de la gare de Paris Austerlitz !
Cette évolution est aussi logique en fonction de l’heure. L’orage est maximal en soirée, puis il diminue d’intensité pendant la nuit et enfin termine souvent son existence dans la matinée qui suit. Cette évolution marque déjà une très grande puissance de l’événement car beaucoup d’orages disparaissent bien avant, dans la nuit.
La perturbation qui traverse la France est exacerbée par la convection. L’accumulation de chaleur diurne en raison de l’ensoleillement est maximale en fin de journée, l’instabilité de l’atmosphère qui en résulte déclenche alors les phénomènes orageux qui se développent jusqu’en début de nuit. A partir de ce moment là, l’orage est privé de sa source d’énergie liée à l’accumulation de la chaleur solaire et perd peu à peu de sa puissance. Il met un temps plus ou moins important pour disparaître en même temps qu’il se déplace. Celui qui atteint la région parisienne, samedi matin, a déjà montré beaucoup de résistance. L’arrivée à ce moment d’un coup de foudre dévastateur montre seulement qu’il n’y a pas un rapport entre la puissance des phénomènes électriques et l’importance des précipitations déposées.
Tout observateur peut constater que des éclairs ou tonnerres dévastateurs peuvent s’accompagner de pluies très faibles et inversement !
La reprise orageuse du samedi soir a provoqué la traînée de grêle très épaisse des plateaux du Velay autour de l’aéroport du Puy Loudes. Heureusement qu’il y avait au cœur du phénomène une station météorologique, il est toujours très difficile de connaître la précipitation qui correspond à de la grêle, car cette dernière a la fâcheuse habitude de boucher les orifices des pluviomètres. Les grêlons ont la particularité de se transformer en une masse de glace qui forme une couche en arrivant au sol. La chute des grêlons est individualisée alors qu’en arrivant au sol ou sur les habitations, ils se transforment en bloc collectif. Cette particularité provoque souvent des problèmes aux toitures planes, celles de l’aéroport par exemple, en raison du poids de la glace accumulée sur ces toitures.
Là encore que signifie la présence de la grêle ? l’instabilité dans les nuages a été telle que les gouttelettes ont été portées à des altitudes où elles ont congelé. Autour du noyau d’origine, d’autres couches de gouttelettes se sont agglutinées à chaque mouvement de va et vient liées à l’instabilité dans le cumulonimbus. Le phénomène s’est poursuivi jusqu’au moment où l’ensemble de grêlons a eu suffisamment de poids pour tomber. Ceci signifie simplement que l’instabilité de l’air a été extrême, l’air chaud de la convection avec les nuages associés a été porté à des niveaux très élevés qui dépassent souvent 10 km d’altitude et la tropopause. Là encore l’importance de la précipitation, 49,7 mm, est loin des records de la station de Loudes et les deux phénomènes sont indépendants sur des espaces géographiques divers puisque ces traînées de grêles concernent rarement des surfaces importantes.
Autre aspect qui ne manque pas d’intérêt, la réaction des rivières aux orages !
Ces derniers provoquent souvent des inondations localisées. Elles ont été signalées dans le sud de la Corrèze, et au nord de l’agglomération stéphanoise. Il s’agit de petites coulées de boue comme celle qui a affecté l’autoroute A72 à La Fouillouse ou de bas fonds où l’eau rentre dans des maisons au Fay à la Talaudière ou dans le sud de la Corrèze.
Les rivières montent–elles?
La Vézère en aval du bassin de Brives présente une montée assez faible qui atteint la cote de 1,45 m à Larche le 3 juillet à 4 heures. En réalité par rapport au niveau d’origine la hausse de la rivière est de l’ordre du ½ mètre.
En Haute Loire, le lendemain, l’orage de grêle du plateau de Loudes a provoqué une réaction ridicule des rivières du secteur. La Borne à la Rochelambert, comme à Espaly monte de moins de 50 cm. Le Dolaizon est encore moins concernée. La rivière qui a le plus réagi dans la région est l’Ance du Nord qui a atteint la cote 1,14 m le 4 juillet à 2 heures à Sauvessanges. Elle se situe nettement à l’écart du secteur grêlé de Loudes, mais elle montre que l’orage a continué sa route, au loin vers le nord-est, avec des pluies plus importantes.
En réalité, la rivière qui a connu la montée la plus importante lors des orages de la nuit du 3 au 4 juillet est le Furan à Andrézieux à sa confluence avec la Loire. Il atteint la cote de 1,90 m le 4 à 1 heure. La crue n’a rien d’exceptionnel, puisqu’à cette station, une cinquantaine ont dépassé la cote de 2 mètres. La montée des eaux est cependant rapide, un peu plus de 1,50 m en 1 heure 30.
Sur ce bassin, les précipitations n’ont pourtant rien de remarquable, j’ai mesuré un peu plus de 21 mm à mon poste de Saint Etienne. Selon « Météociel » une hauteur de 44 mm serait tombée, mais il ne semble pas que la station d’Andrézieux ait reçu beaucoup d’eau.
On tombe déjà sur un premier problème des précipitations d’orages. Elles sont tellement localisées qu’il n’y a pas toujours de station météorologique, comme celle du Puy Loudes pour se trouver juste dessous le paroxysme d’un orage !
Samedi 4 juillet, le bassin amont n’est pas concerné, l’aval à Andrézieux non plus, c’est une bande intermédiaire au demeurant très étroite de La Fouillouse à la Talaudière qui reçoit la pluie puisque ce secteur concentre les impacts !
Pour connaître la géographie précise des pluies il conviendrait de traiter les images du radar météorologique, ce qu’effectue la société stéphanoise Rhéa avec le logiciel calamar.
Dans ces conditions comment se fait-il qu’une pluie intense certes, mais non exceptionnelle par sa quantité, sur un espace aussi réduit, provoque une montée aussi rapide du Furan ?
Une fois de plus le caractère urbain de la partie du bassin du Furan située dans la dépression stéphanoise joue un rôle prépondérant. L’imperméabilisation d’une grande partie de la surface dans la ville et les communes environnantes, d’une agglomération supérieure à 300000habitants, provoque une hausse rapide de la rivière que l’on ne retrouve pas en milieu rural où l’absorption par le sol liée à la forte évaporation en été joue un rôle prépondérant.
Les morales de cette histoire : un orage faiblissant peut avoir des coups de foudre ravageurs, des trainées de grêles peuvent accidenter leurs trajectoires sur des axes aléatoires avec un risque majeur sur les toitures planes, les rivières réagissent peu aux orages sauf en milieu urbain. La ville n’aime pas l’orage.
Gérard Staron vous donne rendez vous samedi prochain sur les ondes de Radio Espérance. Bonne semaine à tous.