Chronique climatologique N°190, le 5/08/1998 avec Gérard et Marie-Gabrielle texte d’origine
Les événements météorologiques dramatiques n’ont pas manqué cette semaine avec l’orage de la région lilloise, les incendies de forêt en Grèce et enfin les inondations du Yang Tsé Xiang en Chine, par quoi commençons nous?
Je vous ai, à de très nombreuses reprises, parlé d’inondations, aussi pour chacun de ces débordements, je vais essayer de traiter d’un élément particulier dont je ne vous ai pas entretenu.
Qu’est-ce qui a été choisi pour les orages du nord de la France?
Deux régions ont défrayé la chronique aux deux extrémités de la France pour leurs précipitations, l’une de façon catastrophique avec le nord dans la région de Saint-Omer Lille et l’autre à l’extrémité sud-est de la France avec les Alpes maritimes où à l’exception de touristes obligés de prendre l’imperméable, le phénomène a été plutôt bien ressenti en particulier par les agriculteurs.
Je vais vous poser une petite question, dans laquelle de ces deux régions a-t-il le plus plu?
Vous pensez que ce serait logiquement dans le nord, en réalité les totaux sont tout à fait comparables. Au centre de l’orage au nord, on a dépassé les 50 mm et de même pour la région de Cannes dans les Alpes maritimes. Seule différence, l’espace géographique concerné par les fortes pluies a été plus vaste dans les Alpes maritimes alors que dans la région lilloise, les totaux tombent très vite, par exemple 15 mm à Lille et à Saint-Omer.
Alors comment expliquer l’impact très différent de ces deux phénomènes pluvieux?
Il semble qu’il faille invoquer plusieurs facteurs:
--- Les mesures de l’orage du nord, en particulier dans les régions de Saint-Omer et Lille ont peut être été minorées en raison de la grêle qui a pu obstruer , à la fin de l’averse, les orifices des pluviographes. Cette situation s’est, par exemple, déjà produite lors de l’orage du 23 août 1994 à Saint-Etienne où seul un poste d’observation avait pu échapper au problème et fournir des données représentatives.
--- En dépit de cette réserve sur les mesures, il n’est pas étonnant qu’il pleuve plus dans les Alpes maritimes que dans le nord alors que c’est le second endroit qui connait les dégâts.
-- Premièrement, l’impact d’une précipitation provient essentiellement de l’habitude qu’à une région ou non de connaître la quantité qui tombe. Or 50 mm en 24 ou 48h est une précipitation habituelle dans les Alpes maritimes, une région qui reçoit les abats pluvieux méditerranéens qui peuvent atteindre très souvent largement plus de 200 mm en 24 h. La région du nord de la France connait au contraire un climat océanique, renommé pour ses petites averses répétitives, mais où 50 mm en 24h s’approche largement des records d’intensité et peut provoquer un effet de surprise pour les populations.
--- Secondement la forme de la précipitation joue aussi. Les Alpes maritimes sont habituées aux précipitations intenses sur quelques heures, or ici l’épisode pluvieux s’est étalé sur 2 jours. Au contraire, le nord de la France a peu l’habitude des orages violents sur quelques heures, par exemple pour la carte des impacts de foudre en France or le 1er août ce fut le cas.
--- Enfin depuis le début du mois de juillet, le nord de la France avait connu le passage de perturbations répétées avec un total pluviométrique substantiel, alors que les Alpes maritimes connaissaient la très classique sécheresse méditerranéenne d’été. Dans ces conditions l’eau tombée a pu remplir les barrages, humecter un sol sec, ce qui évite pour quelques jours les incendies de forêts d’été comme par exemple ceux de Grèce, et a été une aubaine pour l’agriculture.
Ne nous étonnons pas, même si cela peut surprendre, que ce n’est pas où il pleut le plus que l’impact est toujours le plus fort sur les populations.
Maintenant pouvons-nous aborder le problème des inondations en Chine, avec les problèmes de digues?
D’abord en l’état de mes informations, je ne possède pas assez d’éléments pour faire une étude hydro-climatologique de la crue du Yang Tsé Xiang, aussi je vais me contenter d’émettre quelques remarques sur le rôle des digues en cas de crue dans ces zones de basses vallées alluviales ou de deltas comme nous les trouvons en Chine. D’abord dans ces régions basses au contact de la mer, les fleuves alluvionnent tellement qu’ils forment ce que l’on appelle des bourrelets de crues. Ces alluvions qui se déposent ont tendance à exhausser le lit du fleuve par rapport à sa vallée alluviale, c’est le cas de la Loire dans son val, du Pô en Pandanie, du Rhône dans son delta qui coulent quelques mètres au dessus de sa vallée. En cas de crue, en zone sauvage, le fleuve passait par-dessus le bourrelet et allait créer un nouveau lit ailleurs, c’est pourquoi dans tous ces deltas ou vallées alluviales on peut retrouver les multiples anciens lits du fleuve comme la Loire, le Rhône, le Pô et aussi sur les fleuves chinois. Comme ces vallées ou deltas, ont souvent des sols très riches, les hommes les ont mis en valeur par exemple avec les cultures de riz, du soja, du coton en Chine, ils ont souvent installé ses habitations sur les bourrelets de crue et ont tenté de protéger le tout avec des digues. Seulement chassez la nature, elle revient au galop. Lors des très grandes crues, ces fleuves ont tendance à perçer les digues pour installer leur lit ailleurs. L’histoire des digues n’est qu’une suite de brêches lors des grandes crues, sur la Loire lors des crues du siècle dernier, sur le Rhône lors de celles de 1993-1994 en Camargue, et en Chine il en est de même.
Seuls les néerlandais savent maîtriser et encore pas toujours (février 1953) l’art des digues. Pour pallier à ce risque dans des zones très basses, le seul moyen est de déverser l’eau volontairement dans certains secteurs inhabités pour en protéger d’autres densement peuplés, ce que l’on nomme des déversoirs. C’est-ce qu’il est prévu de mettre en place dans le val de Loire en vue des prochaines crues. C’est-ce que semblent avoir fait les chinois, mais semble-t-il avec le respect très douteux des vies humaines qu’on leur connait. De plus, ceci ne s’improvise pas à la dynamite au dernier moment, mais doit faire l’objet d’un aménagement concerté. Au plaisir de vous reztrouver vendredi prochain pour une nouvelle chronique de climatologie.
Commentaire actuel
Déjà il y a 10 ans, des orages avaient inondé le nord de la France alors que des pluies au moins aussi fortes n’avaient pas causé de dégâts significatifs dans le sud.
Ceci s’est reproduit dans la nuit du 11 au 12 septembre 2008 avec les orages de la région de Cambrai alors que les départements des Bouches du Rhône, du Gard et du Vaucluse étaient en alerte " orange inondation" sans impacts majeurs !
Le Nord de la France est plus souvent touché que son climat le laisserait penser par des phénomènes orageux en été. L’air froid qui descend de vient souvent instable .
Des inondations en Chine s’étaient produites en même temps, le gouvernement de ce pays ne s’était pas embarrassé de scrupules pour traiter le problème, en choisissant de noyer certains secteurs pour préserver une ville! Cette année les tremblements de terre et les jeux olympiques on plus défrayé la chronique pour ce pays !
Gérard Staron